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Le développement de cette activité date des lendemains de la seconde guerre mondiale, avec notamment comme événement "stratégique" d'importance la création le 18 octobre 1945, par le Général De Gaulle, du Commissariat à l'Energie Atomique (CEA). | Le développement de cette activité date des lendemains de la seconde guerre mondiale, avec notamment comme événement "stratégique" d'importance la création le 18 octobre 1945, par le Général De Gaulle, du Commissariat à l'Energie Atomique (CEA). | ||
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− | La découverte de l'uranium et des minéraux uranifères n'est pourtant pas récente puisque c'est le 24 septembre 1789 que le chimiste prussien Klaproth découvre ce nouveau métal, le baptisant du nom de la 7ème planète du système solaire, Uranus, découverte quelques années plus tôt. | + | La découverte de l'uranium et des [[minéraux]] uranifères n'est pourtant pas récente puisque c'est le 24 septembre 1789 que le chimiste prussien Klaproth découvre ce nouveau [[métal]], le baptisant du nom de la 7ème planète du système solaire, Uranus, découverte quelques années plus tôt. |
− | Un siècle plus tard, en 1896, le physicien français Henri Becquerel découvre la radioactivité naturelle. Cette découverte peut être considérée comme le point de départ de l'industrie des minerais radioactifs. Dans un premier temps les chercheurs, chimistes et physiciens du monde entier vont se lancer dans l'étude du phénomène de la radioactivité, de ses origines et de ses applications possibles. Les découvertes et les événements vont alors se succéder à un rythme effréné : | + | Un siècle plus tard, en 1896, le physicien français Henri Becquerel découvre la radioactivité naturelle. Cette découverte peut être considérée comme le point de départ de l'industrie des [[minerais]] radioactifs. Dans un premier temps les chercheurs, chimistes et physiciens du monde entier vont se lancer dans l'étude du phénomène de la radioactivité, de ses origines et de ses applications possibles. Les découvertes et les événements vont alors se succéder à un rythme effréné : |
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* 1900, le Français Paul Villard met en évidence le rayonnement gamma. | * 1900, le Français Paul Villard met en évidence le rayonnement gamma. |
Version du 20 décembre 2009 à 12:26
L'URANIUM
par Pierre-Christian GUIOLLARD
Auteur-éditeur, spécialiste de l'histoire des techniques minières.
Site web : http://www.guiollard.fr
L'industrie de l'uranium est la dernière née des industries minières, tant en France que dans le monde.
Le développement de cette activité date des lendemains de la seconde guerre mondiale, avec notamment comme événement "stratégique" d'importance la création le 18 octobre 1945, par le Général De Gaulle, du Commissariat à l'Energie Atomique (CEA).
Cette industrie dont le développement sera particulièrement rapide verra son apogée dans les années 80 pour s'éteindre progressivement avec les dernières années du siècle. A Jouac, en Haute-Vienne, la dernière mine d'uranium française fermera ses portes au mois de mai 2001.
HISTOIRE
La découverte de l'uranium et des minéraux uranifères n'est pourtant pas récente puisque c'est le 24 septembre 1789 que le chimiste prussien Klaproth découvre ce nouveau métal, le baptisant du nom de la 7ème planète du système solaire, Uranus, découverte quelques années plus tôt. Un siècle plus tard, en 1896, le physicien français Henri Becquerel découvre la radioactivité naturelle. Cette découverte peut être considérée comme le point de départ de l'industrie des minerais radioactifs. Dans un premier temps les chercheurs, chimistes et physiciens du monde entier vont se lancer dans l'étude du phénomène de la radioactivité, de ses origines et de ses applications possibles. Les découvertes et les événements vont alors se succéder à un rythme effréné :
- 1898, découverte par Pierre et Marie Curie du radium et du polonium.
- 1898, Rutherford découvre les rayonnements alpha et béta.
- 1900, le Français Paul Villard met en évidence le rayonnement gamma.
- 1901, premières tentatives d'utilisation du radium à des fins thérapeutiques par Henri Becquerel et Pierre Curie.
- 1903, Rutherford et Soddy établissent la loi de décroissance de la radioactivité.
- 1911, découverte du noyau de l'atome par Rutherford.
- 1934, découverte de la radioactivité artificielle par Irène et Frédéric Joliot-Curie.
- 1942, premier réacteur nucléaire mis en route à Chicago par E. Fermi.
- 1945, explosions nucléaires d'Hiroshima et Nagasaki.
Avant la création du CEA, la minéralogie de l'uranium en France était réduite à trois espèces nettement identifiées : l'autunite, découverte par De Champeaux en 1800 à Saint-Symphorien-de-Marmagne (Saône-et-Loire), la chalcolite découverte en 1852 par Boisse près d'Entraygues (Aveyron) et la pechblende découverte par Demarty vers 1927 à Saint-Rémy-sur-Durolles (Puy-de-Dôme). Dès le début du siècle la mise en évidence des applications thérapeutiques du radium provoque une première aventure industrielle et minière et de nombreux prospecteurs partent à la recherche des minéraux radioactifs, sources de radium. L'uranium n'intéresse pas encore les mineurs, son utilisation est limitée à la coloration des verres, céramiques ou porcelaine, à la chimie analytique et aux alliages à forte densité. En 1905, Hippolyte Marlot entreprend les premiers travaux miniers sur le gisement des Riaux près de Saint-Symphorien-de-Marmagne où fut découvert l'autunite. En 1925, Victor Lassalle découvre la chalcolite dans la mine du Crôt Blanc près de Grury (Saône-et-Loire). En 1927, Monsieur Thave découvre le gisement de Lachaux (Puy-de-Dôme). Ces gisements auront une première vie éphémère mais seront tous repris après 1945 pendant la ruée vers l'uranium. Entre 1900 et 1939, 7500 tonnes d'uranium extraites fourniront environ 900 g de radium.
LA RUÉE VERS L'URANIUM
1945, la bombe atomique, la fin de la guerre, le monde est partagé en deux, la guerre froide, les incertitudes du lendemain, la crainte d'un affrontement Est-Ouest, autant de raisons pour le gouvernement français d'acquérir le pouvoir nucléaire à des fins militaires mais aussi civiles pour la production d'électricité. L'exploitation des minerais radioactifs devient alors le monopole du Commissariat à l'Energie Atomique. Des équipes de prospecteurs sont formées et lancées à travers le territoire métropolitain mais aussi Outremer. Dans un premier temps, les prospecteurs du CEA sont formés au Muséum d'Histoire Naturelle de Paris puis, à partir de 1956, à Razès (Haute-Vienne) où s'installe le centre de formation des prospecteurs, le CIPRA, qui fonctionnera jusqu'en 1987. Tous les indices connus font l'objet d'études approfondies, dès 1946 Lachaux, Saint-Symphorien et Grury. En 1947, le Limousin est au programme sur la foi d'un indice de chalcolite découvert dans la pegmatite d'une carrière située à Chabannes près de Saint-Sylvestre (Haute-Vienne). Pendant ce temps, la mine de radium de Shinkolobwe (Katanga) est réouverte pour l'uranium en 1945 et c'est l'uranium de ce gisement qui alimentera Zoé, première pile atomique française mise en route en décembre 1948, au fort de Chatillon, près de Paris. Le 25 novembre 1948, la pechblende massive est découverte à La Crouzille (Haute-Vienne). Les travaux miniers débutent aussitôt, le puits Henriette est foncé et les premières tonnes de pechblende françaises sont extraites et expédiées sous escorte à l'usine du Bouchet (Essonne). Le premier gisement de pechblende massive est en exploitation, un minerai extraordinairement riche (31,2 % de teneur moyenne en U pour la colonne Henriette !). Ce gisement, historique dans l'histoire de l'uranium français, sera exploité jusqu'en juillet 1957 fournissant au total 148 tonnes d'uranium métal qui alimenteront les premières piles atomiques françaises (à l'exception de Zoé). Pendant ce temps l'exploration du gisement de Saint-Symphorien est abandonnée en 1949 tandis que se développent les travaux d'exploitation à Lachaux et Grury. La prospection intensifiée en Limousin abouti dès 1951 à la découverte des principaux gisements de la région (Les Sagnes, Margnac, Fanay, Brugeaud,...) qui feront de la Division Minière de la Crouzille le plus important district uranifère français. En 1951/52, les équipes de prospecteurs mettent en évidence d'importants gisements dans la région des Herbiers, l'Ecarpière, la Chapelle Largeaud (Vendée). La Division Minière de Vendée est créée en 1954. En 1954, le gisement des Bois-Noirs (Forez) est découvert. Cette même année le CEA incite les compagnies privées à rechercher l'uranium leur garantissant achat et traitement de leurs minerais. En 1957, les premiers indices du gisement de Lodève (Hérault) sont découverts. Ils aboutiront à la création de la Division Minière de l'Hérault en 1981. Tandis que les mines du Limousin, de Vendée, du Morvan et du Forez entrent dans leur phase d'exploitation, une première petite usine de concentration chimique des minerais est mise en route à Gueugnon (Saône-et-Loire) en 1955. Les usines de l'Ecarpière (Division de Vendée), de Bessines (Division de La Crouzille) et du Forez entreront en service en 1957, 1958 et 1960. Parallèlement à l'aventure métropolitaine, les prospecteurs du CEA s'activent aussi Outre Mer et à l'étranger : Dès 1954 à Madagascar, au Gabon où le gisement de Mounana près de Franceville est découvert en 1956 et mis en exploitation en 1958. Au Niger, la mine d'Arlit est exploitée à partir de 1968. Des prospections sont également menées au Canada et aboutissent en 1968 à la découverte, entre autres, du fameux gisement de Cluff Lake.
torbernite et autunite . Collection musée ferme de l'orme.
LES GISEMENTS
Les minerais d'uranium français sont généralement de faible teneur : de 1 à 4 kg d'uranium par tonne, selon les gisements. Leur exploitation se fait en mine à ciel ouvert pour la partie superficielle et par travaux miniers souterrains pour la partie profonde. L'essentiel des ressources uranifères françaises se trouve dans des gisements associés à des granites : Vendée, Forez, Limousin. Les zones minéralisées se présentent sous forme de filons, de "stockwerks" ou de colonnes. Les minerais primaires (minerais noir) sont essentiellement composés de pechblende, d'uraninite et de coffinite. Les minéraux secondaires sont des produits d'altération des minerais primaires, ils se rencontrent dans la partie superficielle des gisements et constituent rarement à eux seuls des gisements exploitables (le gisement de Margnac est une exception remarquable). Il existe aussi quelques gisements d'origine sédimentaire. Ces ressources se situent dans le Permien (Lodève, Cérilly) ou le Tertiaire Inférieur (Saint-Pierre, Coutras). L'uranium est en général lié à la matière organique, il peut se présenter sous forme minéralogique exprimée de pechblende ou de coffinite ou au contraire intimement lié à la matière organique ou aux argiles.
GEOGRAPHIE DE L'URANIUM EN FRANCE
En 1965, les grands districts miniers sont en place, les ressources globales (exploité compris) sont estimées à 38 600 tonnes d'U. La part du lion revient au CEA qui possèdent plus de 25 000 tonnes d'U soit 65% des réserves métropolitaines sur trois divisions minières :
- Division de Vendée : les gisements de l'Ecarpière, de la Commanderie, du Chardon et de la Chapelle-Largeau sont en exploitation et les minerais sont traités dans une usine située à l'Ecarpière.
- Division de la Crouzille : Cette division dont le siège est à Razès (Haute-Vienne) comprend quatre principaux centre de production : Margnac, le Brugeaud, Fanay-les Sagnes et le Fraisse, Bellezane sera mis en exploitation plus tard en 1975. Une usine de traitement du minerai est installée à Bessines.
- Division du Forez/Grury : La mine des Bois Noirs-Limouzat près de Saint-Priest-la-Prugne (Loire) et celle de Grury (Saône et Loire) constituent les deux sièges d'extraction principaux. L'usine des Bois Noirs à pris le relais de l'usine de Gueugnon en 1961 pour le traitement des minerais de cette division.
Les exploitants privés se répartissent les 35 % des réserves restantes sur trois principaux secteurs :
- Bretagne : gisements de la région du Bonote près de Pontivy (Morbihan) exploités jusqu'en 1983 par la SIMURA (Société Industrielle et Minière de l'Uranium).
- Lozère : Gisements des Pierres Plantées et du Cellier exploités par la CFMU (Compagnie Française des Minerais d'Uranium) jusqu'en 1989.
- Saint-Pierre du Cantal : gisement exploité de 1955 à 1982 par la SCUMRA (Société Centrale de l'Uranium et des Minerais Radioactifs) produisant environ un millier de tonnes d'U.
PROSPERITE ET RECESSION
Le développement des exploitations et la production évolueront au fil des événements politiques et économiques. Les mines d'uranium subiront une première récession dans les années 60 en raison d'une surproduction et du retard pris dans les programmes d'installation des centrales nucléaires. Cette surproduction provoque une baisse des prix. En 1973 le premier "choc pétrolier" relance la prospection et la production, les prix de l'uranium sont en hausse, les gisements sont exploités au maximum. De nouveaux gisements sont découverts et mis en exploitation à Bertholène (Aveyron), dans l'Allier près de Cérilly, en Creuse (Gouzon, Hyverneresse), en Corrèze (mine de La Besse). En 1974 est découvert le gisement de Coutras (Gironde). Malgré des réserves très importantes (supérieures à 10 000 tonnes d'U), ce gisement ne sera pas exploité en raison de la trop faible teneur du minerai (1 "). En 1976, le CEA cède à sa filiale COGEMA (Compagnie générale des Matières Nucléaires) l'exploitation de ses mines métropolitaines. Le gisement du Bernardan, découvert en 1970 par la Compagnie Minière Dong-Trieu entre en exploitation en 1979. En 1981, les gisements de Mas d'Alary, Mas Laveyre et Rabejac près de Lodève (Hérault) sont mis en exploitation par COGEMA. Une usine de traitement des minerais est construite sur place. Cette même année, la Division Minière du Forez est fermée en raison de l'épuisement du gisement des Bois Noirs. Le 29 mars 1979, l'accident de la centrale nucléaire de Three-Mile Island aux Etats-Unis provoque un ralentissement général des programmes de construction de centrales nucléaires. L'offre sur le marché devient plus importante que la demande et les prix chutent à nouveau. Face à la crise, les progrès techniques en matière de traitement des minerais, l'amélioration des méthodes d'exploitation et les restructurations permettent à l'industrie minière française de faire face jusque vers 1988 date à laquelle, la fermeture des principales exploitations fut programmée. 1988 est une année record avec 3420 tonnes d'uranium produites, soit 5,6 % de la production mondiale estimée à 61 000 tonnes. A partir de cette date les fermetures de sièges miniers vont se succéder, la Vendée en 1988, Grury en 1990, La Crouzille en 1995 et Lodève en 1997. Les autres gisements des compagnies privées subiront le même sort tandis que l'approvisionnement de la France en uranium sera désormais assuré par les mines d'Australie, du Niger, du Gabon et du Canada. en 1994, les besoins annuels de la France étaient de 8 900 tonnes d'uranium.
SITUATION EN 2001
Début 2001, pour quelques mois seulement ne reste plus qu'une seule mine d'uranium en activité en France, celle de la Société des Mines de Jouac (SMJ) du groupe COGEMA qui exploite le gisement du Bernardan. L'extraction du minerai se fit de 1978 à 1987 en mine à ciel ouvert et se poursuit aujourd'hui à plus de 400 mètres de profondeur par travaux miniers souterrains. La bonne teneur du minerai (6 kg d'uranium/tonne) explique le maintien en activité de cette dernière mine d'uranium française. Le traitement du minerai est effectué dans une usine située à proximité de la mine, elle produit un concentré de diuranate de magnésie (yellow cake)d'une teneur moyenne en uranium de 750 kg par tonne . La capacité annuelle de production est de 500 tonnes d'uranium métal. Près de 8000 tonnes d'uranium auront été produites à ce jour à l'usine de Jouac. Le maintien de l'activité minière est prévu jusqu'au 31 mai date à laquelle il n'y aura alors plus de mines d'uranium en France. En effet, la mise en exploitation du gisement de Coutras (10 000 t d'U dans un minerai à 1 ") n'est pas d'actualité, il n'est pas économiquement exploitable tout comme ceux plus petits de Cérilly et d'Ygrande dans l'Allier. Pendant un demi siècle, les mines d'uranium françaises ont extrait 52,5 millions de tonnes de minerais et produit 74 600 tonnes d'uranium ce qui représente 3,9% de la production mondiale estimée à 1,92 millions de tonnes dont 1,17 dans les pays du monde à économie de marché.
Pour en savoir plus sur les mineurs d'uranium :
- A. PAUCARD, 1992,1994,1996, La mine et les mineurs de l'uranium français. (3 tomes). Editeur T. Parquet, 19000 - Brive.
- G. CHAPOT, R. COUPRIE, J. DUMAS et P. LEBLANC, 1996, L'uranium vendéen. Cahiers du Patrimoine.
- B. BAVOUX, P.-C. GUIOLLARD, 1998, L'uranium de La Crouzille (Haute-Vienne), Editions P.C. GUIOLLARD, 64410 - Fichous.
- B. BAVOUX, P.-C. GUIOLLARD, 1998, L'uranium du Lodévois (Hérault), Editions P.C. GUIOLLARD, 64410 - Fichous.
- Muséum d'Histoire Naturelle de Paris, 1996, Histoire naturelle de la radioactivité.
- M. CUNEY, J. LEROY, M. MAGEL, 1992, L'uranium, Collection Que Sais-je ?
- Revue le Règne Minéral, 1998, numéro spécial : l'Uranium, Editions du Piat, Glavenas - 43200 - Saint-Julien-du-Pinet.